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Du Gouvernement Civil,

et pour ses intérêts, ils lui appartiennent en propre, et son ouvrage doit durer autant qu’il lui plaît, non autant qu’il plaît à un autre. Et étant doués des mêmes facultés dans la communauté de nature, on ne peut supposer aucune subordination entre nous, qui puisse nous autoriser à nous détruire les uns les autres, comme si nous étions fait pour les usages les uns des autres, de la même manière que les créatures, d’un rang inférieur au nôtre, sont faites pour notre usage. Chacun donc est obligé de se conserver lui-même, et de ne quitter point volontairement son poste[1]

  1. Sentiment et pensée des Pythagoriciens, rapportée par Platon in Apol. Socr., par Cicéron, De senect. Cap. XX. et par Lactance inst. div. l. III, c. 18. L’aimable, le spirituel Montaigne est charmant sur cet article. « Plusieurs tiennent que nous ne devons abandonner cette garnison du monde, sans le commandement expresse de celui qui nous y a mis, et que c’est à Dieu qui nous a ici envoyés, non pour nous seulement, oui bien pour la gloire et service d’autrui, de nous donner congé quand il lui plaira, non à nous de le prendre. Que nous ne sommes pas nés pour nous, ains aussi pour notre pays : par quoi les loix nous redemandent compte de nous pour leur intérêt, et ont action d’homicide contre nous. Autrement comme déserteurs de notre charge, nous sommes punis