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Du Gouvernement Civil,

ils ne différoient non plus guère, eu égard au nombre des loix. Les gouverneurs de ces états, aussi bien que les pères de ces familles, veillant pour le bien de ceux dont la conduite leur avoit été commise, le droit de gouverner et de conduire, étoit alors presque toute la prérogative. Comme il n’y avoit que peu de loix établies, la plupart des choses étoient laissées à la discrétion, à la prudence et aux soins des conducteurs. Mais quand l’erreur ou la flatterie est venue à prévaloir dans l’esprit foible des Princes, et à les porter à se servir de leur puissance pour des fins particulières et pour leurs propres intérêts, non pour le bien public, le peuple a été obligé de déterminer par des loix, la prérogative, de la règler dans les cas qu’il trouvoit lui être désavantageux, et de faire des restrictions pour des cas où les ancêtres les avoient laissées, dans une extrême étendue de liberté, à la sagesse de ces Princes, qui faisoient un bon usage du pouvoir indéfini qu’on leur laissoit, c’est-à-dire, un usage avantageux au peuple.

V. Ainsi, ceux-là ont une très-mauvaise idée du gouvernement, qui disent que le peuple a empiété sur la prérogative, lorsqu’il a entrepris de la déterminer et de la