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par M. Locke.

cipalement lorsqu’il s’agit d’eux-mêmes et de leurs intérêts, la passion et la vengeance sont fort propres à les porter bien loin, à les jeter dans de funestes extrémités et à leur faire commettre bien des injustices ; ils sont fort ardens lorsqu’il s’agit de ce qui les regarde, mais fort négligens et fort froids, lorsqu’il s’agit de ce qui concerne les autres : ce qui est la source d’une infinité d’injustices et de désordres.

V. En troisième lieu, dans l’état de nature, il manque ordinairement un pouvoir qui soit capable d’appuyer et de soutenir une sentence donnée, et de l’exécuter. Ceux qui ont commis quelque crime, emploient d’abord, lorsqu’ils peuvent, la force pour soutenir leur injustice ; et la résistance qu’ils font, rend quelquefois la punition dangereuse, et mortelle même à ceux qui entreprennent de la faire.

VI. Ainsi, les hommes, nonobstant tous les privilèges de l’état de nature, ne laissant pas d’être dans une fort fâcheuse condition, tandis qu’ils demeurent dans cet état-là, sont vivement poussés à vivre en société. De-là, vient que nous voyons rarement, qu’un certain nombre de gens vivent quelque tems ensemble, en cet état. Les incon-