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Du Gouvernement Civil,

tre le pouvoir, sans se mettre en peine de considérer comment et pour quelle fin il avoit été commis ; et que la flatterie s’y étant mêlée, a appris aux Princes à avoir des intérêts distincts et séparés de ceux du peuple ; on a cru qu’il étoit nécessaire d’examiner avec plus de soin, l’origine et les droits du gouvernement ; et de tâcher de trouver des moyens de réprimer les excès et de prévenir les abus de ce pouvoir, qu’on avoit pour son propre bien, confié à d’autres, et qu’on voyoit pourtant n’être employé qu’à faire du mal à ceux qui l’avoient remis[1].

  1. « Dans le commencement, lorsque quelque sorte de gouvernement fut formée, il peut être arrivé qu’on n’ait fait autre chose que de remettre tout à la sagesse et à la discrétion de ceux qui étoient choisis pour gouverneurs. Mais ensuite, par l’expérience, les hommes ont reconnu que ce gouvernement auquel ils se trouvoient soumis, étoit sujet à toutes sortes d’inconvéniens, et que ce qu’ils avoient établi pour remédier à leurs maux, ne faisoit que les augmenter, et on dit que, vivre selon la volonté d’un seul homme, c’est la cause et la source de toutes les misères. C’est pourquoi ils ont fait des loix, dans lesquelles chacun pût contempler et lire son devoir, et connoître les peines que méritent ceux qui les violent. Hooker, Eccl. I, §. 10. »