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Du Gouvernement Civil,

mis quelque autre crime. Qui doute que ce père de famille n’eût pu condamner cet étranger, et le faire mourir, ou lui infliger quelque autre peine, conformément au cas, aussi bien qu’auroit pu faire aucun de ses enfans ? Or, il est clair qu’il auroit été impossible qu’il en eût usé de la sorte, par la vertu de quelque autorité paternelle, sur un homme qui n’étoit point son fils ; il n’auroit pu le faire qu’en vertu du pouvoir exécutif des loix de la nature, auquel, en qualité d’homme, il avoit droit : et parce que l’exercice de ce pouvoir lui avoit été remis entre les mains par le respect de ses enfans, lui seul pouvoit punir un tel homme dans sa famille, laquelle avoit bien voulu faire résider en sa personne toute l’autorité et toute la dignité du pouvoir exécutif.

XXIV. Il étoit aisé et presque naturel aux enfans, de revêtir leur père de l’autorité du gouvernement, par un consentement tacite. Ils avoient été accoutumés, dans leur enfance, à se laisser conduire par lui, et à porter devant lui leurs petits différends : quand ils furent devenus des hommes faits, qui pouvoit être plus propre que leur père pour les gouverner ? Leurs petits biens, et le peu de lieu qu’il y