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Du Gouvernement Civil,

sur ses actions ; cependant, il est aisé de concevoir que dans les premiers tems du monde, et dans les lieux qui n’étaient guère peuplés, des familles venant à se séparer et à occuper des terres inhabitées, un père devenoit le prince de sa famille[1]

  1. « L’opinion du prince des Philosophes est assez probable que le chef de chaque famille en étoit le Roi. Ainsi, lorsqu’un certain nombre de familles se joignirent, pour composer un corps de société civile, les Rois étoient la première sorte des gouverneurs parmi elles ; et il semble que c’est la raison pourquoi ils ont toujours retenu le nom de pères, car on avoit coutume de choisir les pères pour gouverner, ç’a été aussi une fort ancienne coutume, ainsi qu’on voit en la personne de Melchisedec, que ces Rois et ces gouverneurs exerçaient la charge de prêtre et de sacrificateur, que les pères exercèrent peut-être au commencement et pour le même sujet. Quoi qu’il en soit, ce ne fut pas la seule sorte de gouvernement qui fut reçue dans le monde : les inconvéniens d’une sorte de gouvernement obligèrent ceux qui en étoient membres, de se diviser, de le changer, et d’en former d’autres. En un mot, tous les gouvernemens publics, de quelque nature qu’ils aient été, semblent évidemment avoir été formés de l’avis de chacun, par délibération, par consultation, par accord, et après qu’on avoit jugé qu’ils étoient utiles et nécessaires ; quoiqu’il ne fût pas impossible, à considérer la nature