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par M. Locke.

Que si cet homme, dont nous parlons, a pris, à la vérité, plus de fruits et de provisions qu’il n’en falloit pour lui seul ; mais qu’il en ait donné une partie à quelqu’autre personne, ensorte que cette partie ne se soit pas pourrie, mais ait été employée à l’usage ordinaire ; on doit alors le considérer comme ayant fait de tout un légitime usage. Aussi, s’il troque des prunes, par exemple, qui ne manqueraient point de se pourrir en une semaine, avec des noix qui sont capables de se conserver, et seront propres pour sa nourriture durant toute une année, il ne fait nul tort à qui que ce soit : et tandis que rien ne périt et ne se corrompt entre ses mains, faute d’être employé à l’usage et aux nécessités ordinaires, il ne doit point être regardé comme désolant l’héritage commun, pervertissant le bien d’autrui, prenant avec la sienne la portion d’un autre. D’ailleurs, s’il veut donner ses noix pour une pièce de métal qui lui plaît, eu échanger sa brebis pour des coquilles, ou sa laine pour des pierres brillantes, pour un diamant ; il n’envahit point le droit d’autrui : il peut ramasser, autant qu’il veut, de ces sortes de choses durables ; l’excès d’une propriété ne consistant point dans