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ble document. L’auteur grec nous dit, en effet, que les Scythes s’appelaient eux-mêmes Scolotes du nom d’un de leurs rois et ce nom se rapproche bien de celui de Scots (ou Gaels), qui selon la version du Leaber Gabala, habitèrent la Scythie avant de venir en Irlande. Hérodote nous dit aussi que la coutume des Scythes et des Thraces était d’élever comme une montagne de terre sur le corps de leurs princes morts ; de même chez les Scots d’Irlande on retrouve la mode des Carns. Enfin Hérodote nous parle de peuples monoculaires habitant, comme les Fomoriens, au nord des Scythes ; il nous dit que dans la Thrace on adorait comme dieux, Mars, Bacchus, Diane et surtout Mercure : de même dans les pays celtiques. Le fameux Zalmoxis qui passait pour le législateur des Thraces était aussi celui des Celtes et son nom de Gebelisis c’est à dire le dieu Bel Isis rappelle les deux divinités adorées chez les Gaulois. Hérodote confirme le départ d’une partie des Scythes hors de leur pays.

Voilà l’exposé du Leabar Gabala. C’est merveille que cet ouvrage, dont l’importance dépasse celle des Annales d’Irlande[1], n’ait pas déjà tenté un traducteur. La cause en est une expression peu rassurante qui fit illusion à O’Donovan lui-même, lorsqu’il la lut dans la Préface d’O’Cléry. Cet auteur dit, en effet, qu’il a corrigé, expurgé et rédigé. Mais les coupures, loin de nuire à l’ouvrage, lui sont profitables, car elles ont été pratiquées sur les redites et principalement sur les interpolations bibliques. O’Cléry nous indique la nature de ces prétentions quand, à la fin de sa préface, il dit qu’il passera sous silence ce qui concerne la création et autres inventions bibliques.

Puisse ce travail attirer l’attention sur les études celtiques, trop longtemps négligées pour les classes latines. Il semble que l’idéal de nos professeurs soit de faire de leurs élèves des Romains du siècle d’Auguste, et, de fait, les idées morales de nos jeunes gens ne s’élèvent pas au-dessus du niveau d’un Horace ou d’un Catulle. Mais la platitude et l’inconséquence d’un peuple qui se modèle sur ses anciens conquérants devient, en outre, un danger.

  1. Célèbre ouvrage des mêmes auteurs. Lisez O’Curry Lectures, page 168.