Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/87

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hors. Sy se esmerveillèrent moult comment elle estoit sauvée, et elle leur dit que une voix lui avoit dit que c’estoit pour les jeunes du vendredy et du samedy, comme ouy avez. Et, pour la grace que Dieu luy avoit faite, elle leur voua que elle se tendroit nettement et chastement, et useroit sa vie au service de Dieu et de son Église.

Si le fist tousjours ainsi, comme celle qui ala jour et nuit servir à l’église pour alumer les torches, les cierges et les lampes, et balayer et tenir nettement l’eglise. Si luy advint une nuit une vision que elle traioit d’un fumier ung vaissel comme un plat d’argent. Sy le regardoit et y véoit plusieurs taiches noires, sy lui disoit une voix : « Frotte et nectoye cest plat, et ostes ces taiches noires tant qu’il soit cler et blanc, comme il estoit quand il parti des mains du maistre. » Et ceste advision si lui advint par trois fois. Si s’esveilla et recorda son advision à Dieu, et quant il fust hault jour sy s’en ala confesser à un saint homme et lui deit son advision, et quant le preudomme eut ouy son advision, si lui dit :

« Belle fille, vous estes moult tenue à Dieu servir, car il vuelt vostre salvacion, et vous a monstré comment vous vous devez laver et nectoyer par confession vos péchiez. Si vous diray comment il le vous demonstra par vostre avision. Car le vaissel d’argent trait du fumier, signifie l’ame qui est ou corps ; car l’ame est blanche et nette, et se le corps ne se consentist à faire pechié, elle feust touzjours blanche, comme le vaissel d’argent qui vient de l’orfèvre blanc et net ; et aussi est l’ame quant elle vient des fons de baptesme. Et ainsi comme le vaissel que vous veistes qui estoit au fumier, aussi est