forte fin ; maiz sa suer puisnée, qui aussy avoit perdu, ne faisoit semblant de sa perte, ains faisoit aussy bonne chière comme se elle eust tout gaingné. Le roy d’Espaigne resgarda tout ce ; si se retraist à côté et appela ses gens et ses barons, et leur dit : « Vous savés que les roys d’Espaigne ne les roys de France ne se doivent pas marier par convoitise, fors noblement et à femmes de bonnes meurs, bien nées et bien tailliées de venir à bien et à honneur, et à porter fruit, et pour ce j’ay veues ces deux filles et leurs manières, et me sembla que la plus jonne est la plus humble et plus courtoise que n’est l’autre, et n’est pas de si haultain cottraige ni de si haulte manière comme l’ainsnée, comme j’ay peu appercevoir, et pour ce prenés la plus jeune, car je l’eslis. » Si lui respondirent : « Sire, l’ainsnée est la plus belle, et sera plus grant honneur de avoir l’ainsnée que la plus juenne. » Si respondit que il n’estoit nul honneur ne nul bien terrien qui s’acomparaige à bonté et à bonnes meurs, et par especial à l’umilité et à humblesce, et pour ce que je l’ay veue la plus courtoise et la plus humble, si la vueil avoir. Et ainsi l’esleut.
Et adoncques l’evesque et les barons vindrent au roy d’Arragon et luy demandèrent sa fille plus juenne, dont le roy et tous ses ens en furent moult esmerveillez qu’ilz ne prenoient l’ainsnée, qui estoit la plus belle de moult. Maiz ainsi avint que la plus jeune fut royne d’Espaigne, pour estre humble et de doulces parolles au grant et au petit, et par sa courtoisie fut esleue. Dont l’ainsnée eust grant desdaing et grant despit, et en fut toute forcennée, et pour ce a cy bon exemple comment par courtoisie et par humilité l’on accroist