Page:Littré - Pathologie verbale ou lésions de certains mots dans le cours de l’usage.djvu/59

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pas difficile de voir comment cette même acception moderne est née. Le préjugé théologique attachait naturellement un blâme à celui qui ne se soumettait pas aux croyances de la foi. De religieux, ce blâme ne tarda pas à devenir simplement moral ; et c’est ainsi que libertin s’est écarté de son origine, non pas pourtant au point de désigner toute offense à la morale ; il note particulièrement celle qui a pour objet les rapports entre hommes et femmes.

Limier. — Il est curieux de remarquer les ressources de l’esprit linguistique pour dénommer les objets. Le limier est une espèce de chien de chasse. Eh bien ! le mot ne veut dire que l’animal ou l’homme tenu par un lien. En effet, limier, anciennement liemier, de trois syllabes, vient du latin ligamen, lien. Tout ce qui porte un lien pourrait être dit liemier. L’usage restreignit l’acception à celle du chien qui sert à la chasse des grosses bêtes. Il n’est pas besoin de signaler l’usage métaphorique de ce mot dans limier de police.

Livrer. — En passant de l’usage latin à l’usage roman, les mots n’ont pas seulement changé de forme, ils ont aussi changé d’acception. Livrer en est un exemple. Il vient du latin