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Q. — Préférez-vous Barrès à d’Annunzio ?

R. — D’Annunzio a plus de folie, c’est-à-dire plus de courage.

Q. — Vous voulez dire que l’accusé est un lâche ?

R. — Il a plus de finesse que d’Annunzio.

Q. — Préférez-vous Marinetti à Barrès ?

R. — Je ne me souviens plus de Marinetti ; j’avais trois ans lorsqu’il est mort. Il y a aussi un certain Marinetti qui est commis-voyageur d’une fabrique de phallus. Je ne l’ai jamais connu.

Madame Rachilde

On ne peut pas fonder une chose sérieuse sur de l’absurde, parce que le public ne vous suit pas. Les gens qui composent un public peuvent être compréhensifs, mais ils viennent sur l’annonce d’une étiquette. Jetez leur, une fois, des pois ou des haricots à la figure, ils seront indignés si vous vous contentez de leur faire une conférence plus ou moins intelligente sur un individu ou une œuvre. Alors, ils jetteront, de leur côté, les haricots et les pois au visage nouveau que vous leur montrez. En principe, mettre en jugement (puisque vous aimez cette formule) une série de pontifes plus ou moins respectables est une chose relativement raisonnable. Quelque puisse être la valeur des gens de lettres arrivés, il est toujours bon de leur faire comprendre qu’on n’a pas le droit d’arriver de son vivant. L’être entièrement épanoui, ou se croyant tel, porte une ombre plus large et l’ombre est toujours nuisible à quelqu’un ou à quelque chose. Or, comme l’ombre se trouve généralement derrière eux, la leur allonger devant eux est toujours très instructif… avec ou sans mesure.

Encore ne faut-il pas baser un système de critique, de jugement sans appel, sur une philosophie qui paraît ennuyeuse parce qu’elle ne comporte plus les cris d’animaux, sinon les projectiles légumineux.

M. Jacques Rigaut

Q. — Vous ne voulez pas prêter serment ?

R. — Non.