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effet le résultat d’un besoin toujours renaissant, d’une propension naturelle de l’âme, et de l’amour instinctif que nous avons tous du beau, du bon et du juste. À défaut de leur réalité, nous nous en créons un simulacre, une image plus ou moins embellie, et c’est ce qui fait que l’amour platonique est aussi vrai et tout aussi durable que l’amour naturel.

Et maintenant que nous avons pu apprécier la nature élevée, le caractère noble de ce tendre sentiment auquel Dante livra son âme, terminons cette rapide esquisse en citant brièvement quelques-uns des passages où le grand poète, exalté par son enthousiasme mystique, évoque cette figure céleste de Béatrice, sous la couronne de gloire qu’il lui tresse dans ses vers.

C’est au milieu des visions paradisiaques qu’il semble surtout se plaire à la contempler et à lui offrir l’encens de ses louanges.

Perdu dans cette mer d’éternelle lumière,
Ce phare m’éblouit tellement de ses feux,
Que je ne vis plus rien dans ce miroir des cieux…
Aimer et ne plus voir ramenèrent mon âme
Au flambeau de ma vie, aux beaux yeux de ma Dame…

Dussé-je en son honneur réunir dans mes vers,
Tout ce que j’ai dit d’elle en mille chants divers,
Je resterais encore impuissant à la peindre…
Aux beautés que je vis nul ne saurait atteindre ;
Je dis plus, et je crois qu’un Joyau d’un tel prix,
Par son créateur seul peut être bien compris !
....................

Comme un soleil trop vif brûle mes faibles yeux,
Devant ce doux sourire et sa splendeur suprême,
Ma mémoire fléchit et se manque à soi-même.
Du jour où je la vis pour la première fois,
Jusqu’à ce nouveau Jour, ni mes vers, ni ma voix