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et noble passion, qui a donné l’essor à ses hautes facultés et à sa sublime inspiration.

Béatrice a été non seulement pour Dante, la Dame adorée, l’amante idéale ; mais la tendresse mystique du poète l’a transfigurée et, pour ainsi dire, divinisée. Il en a fait sa muse inspiratrice, son guide, sa lumière. Elle a été pour lui l’étoile radieuse, l’astre propice illuminant son intelligence et son cœur, et épanchant sur son front le rayon divin qui fait jaillir la source des grandes pensées et des beaux vers.

Dans une sorte d’autobiographie, pleine d’une psychologie raffinée qu’il a intitulée La Vie nouvelle, il a fait l’histoire, ou plutôt il a donné l’analyse subtile de cette passion, de ce renouvellement intérieur que produisirent dans son âme la jeunesse et les grâces virginales de Béatrice. Il a raconté comment était né ce tendre et constant amour, qui, plus tard, en grandissant, en s’exaltant, en s’épurant, a fini par régner souverainement sur sa vie.

C’est là un phénomène moral dont il est intéressant de suivre le développement, mais auparavant il devient nécessaire de dire quelques mots de la personne de cette Béatrice, si pieusement adorée, qui fut l’âme de la Vie nouvelle, première composition de la jeunesse de Dante, comme elle vivifia plus tard les grands poèmes de son illustre amant.

Béatrice, appelée plus rarement Béatrix, nommée aussi par abréviation Bice, est née à Florence en 1266, et elle mourut dans la même ville, en 1290, à l’âge de vingt-quatre ans. Dante n’avait que neuf ou dix mois de plus qu’elle.

Béatrice était fille de Folco di Ricovero Portinari, citoyen riche et très distingué de Florence. Les familles Portinari et Alighieri étaient liées d’amitié. À l’ouverture du printemps de 1276, pendant les fêtes de Mai, célébrées dans toutes les familles de la ville, le jeune Alighieri, ache-