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luth et de la cithare, le mélodieux récit de cette chronique de poésie.

C’était au premier soleil de mai. Ce jour-là l’aurore s’est réveillée dans un ciel enchanté, et bientôt l’horizon étincelant nage dans des flots de lumière. Le matin a laissé s’envoler jusqu’à son dernier voile, les ombres et les brumes entièrement évanouies laissent voir un délicieux jardin, où croissent l’oranger parfumé, le figuier aux fruits savoureux, et l’olivier, trésor de l’heureuse Occitanie. Au milieu s’élève, comme un séjour de féerie, une somptueuse demeure de la plus élégante architecture. Ce n’est point un de ces gothiques donjons armés contre les ennemis et contre les hivers. Cet édifice à l’aspect hospitalier, annonce les temps paisibles, un doux climat et l’empire d’une femme.

Ce lieu charmant réunit une foule de brillants convives. Les uns se promènent sous d’épaisses charmilles, et suivent les sinueux détours des labyrinthes de verdure. D’autres font résonner le théorbe et le luth. Le luth, dans cet asile tout rayonnant de poésie, pourrait-il être muet et ne pas rendre des accords enchanteurs ?…

Des grottes tapissées de mousse et des berceaux de feuillage retentissent de rires joyeux, et les piquantes saillies volent comme des flèches légères. La reine de ces fêtes, la belle Isaure, circule au milieu de ses hôtes, adressant à chacun une aimable bienvenue. Mais, ses devoirs remplis et comblée d’hommages, elle sent le besoin de goûter quelque liberté ; elle s’achemine bientôt vers un bois d’arbres au feuillage sombre, dont les rameaux entrelacés forment une voûte impénétrable aux feux du jour. L’étroit sentier qui serpente sous ce dôme de verdure, conduit au bord d’un limpide bassin appelé la Fontaine du Troubadour. Isaure marche seule et pensive. Elle éprouve cette douce et divine