De ses quinze ans Rose inquiète,
Déjà rêvant un doux aveu,
Vient demander à la fleurette
Si le beau Sylvain l’aime un peu.
De plus en plus son sein palpite,
Son front se penche tout à coup ;
Mais, fleur d’espoir, la Marguerite
Lui dit : Sylvain t’aime beaucoup !
À vingt ans, tu peux, jeune fille,
L’interroger impunément :
À cet âge heureux, la sibylle
Dit toujours : — Passionnément…
Mais que la prudence t’arrête,
Ne pousse pas l’oracle à bout ;
Plus tard, tu pourrais, ma pauvrette,
Pour réponse avoir : — Pas du tout.
Marguerite ! des fronts de reine
Sous ton nom se sont illustrés ;
Toi, plus modeste souveraine,
Tu fais l’ornement de nos prés.
L’orage, au-dessus de ta tête,
Obscurcit le vaste horizon…
Mais rassure-toi, la tempête,
Respecte un trône de gazon.
De tes sœurs, orgueil du parterre,
Le règne ne dure qu’un jour ;
Mais le tien, loin d’être éphémère,
Est éternel comme l’amour !…