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chants, des cantiques, des airs, des hymnes nationaux, moraux, politiques, religieux, faits pour le peuple, enseignés au peuple, chantés par les laboureurs, les artisans, les ouvriers, les garçons et les filles, les hommes et les femmes du peuple.

Tous les grands artistes, poètes et musiciens, fourniront leur contingent à ce répertoire populaire incessamment renouvelé. L’état décernera des honneurs, des récompenses publiques, à ceux qui auront été comme nous[1] trois fois aux concours généraux ; et toutes les classes enfin, se confondront dans un sentiment commun, religieux, grandiose et sublime.

Ce sera le fiat lux de l’art.

Vienne, vienne donc une ère glorieuse où l’art se complète et se développe à la fois sous toutes ses faces, et s’élève au plus haut degré en unissant fraternellement les hommes dans de ravissantes merveilles. Vienne le temps où l’inspirateur ne sera plus pour l’artiste cette eau amère et fugitive qu’il trouve à grand peine, après avoir creusé dans un sable stérile, mais où elle s’épanchera comme une source inépuisable et vivifiante. Vienne, oh ! vienne l’heure de délivrance où le poète et le musicien ne diront plus « le public » mais « le peuple et Dieu[2] ».

  1. Sic dans le texte : il faut lire sans doute : « couronnés trois fois. »
  2. L’inspiration lamennaisienne est trop sensible dans ce dernier fragment pour qu’il y ait besoin de faire plus que de la signaler.