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glorieuse proclamation de la Charte de 1830, je me permettrai de leur demander de quelle façon ils entendent cette aristocratie de l’intelligence, constituée par les écrivains et les avocats, et quel rôle on nous a donné à jouer jusqu’ici, à nous musiciens ?… Je leur demanderai encore ce qu’ils pensent de l’excommunication religieuse qui, en France, frappe encore une si notable portion d’entre nous, et des escaliers de service par lesquels, dans les maisons aristocratiques de Londres, on fait passer des artistes de premier ordre, tels que Moschelès, Rubini, Lafont, Pasta, Malibran, etc., etc.

Quelle est donc l’initiative et l’action sociale réservées à l’art musical, et que signifient les prostrations et les pasquinades forcées de tant d’artistes déchus de leurs nobles prérogatives ?…

Ce serait peut-être ici le lieu de remarquer (au risque d’exciter quelque hilarité sur le banc des docteurs) qu’il y a peu d’années, trois poètes, MM. de Chateaubriand, Canning et Martinez de la Roza, étaient à la tête du gouvernement de trois nations puissantes, et que jamais musicien n’a influé largement et politiquement sur les destinées de son pays. Il est vrai qu’à peu près en même temps que Lamartine et Monsieur Viennet représentaient chacun (à la Chambre des députés) une face différente de la poésie contemporaine, feu l’empereur d’Autriche baronisa Paganini ; son ex et feu Majesté impériale, royale et constitutionnelle don Pedro, daigna nous faire entendre une ouver-