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que je vous en avais parlé précédemment de la façon la plus circonstancielle ; vous avez su, du moins en partie, les brutales interprétations auxquelles mes observations donnèrent lieu et les mille désagréments que ma lettre m’attira. Ce fut pour moi une nouvelle occasion de méditer sur la critique en général, et sur la critique musicale en particulier. Mes réflexions appuyées sur mainte expérience personnelle et sur une multitude de faits bien connus, parcouraient toujours le même cercle et m’amenaient inévitablement à la même conclusion que je répugnais pourtant à en tirer ; c’est que la tâche de critique, que je regarde comme utile, laborieuse, difficile, et par conséquent digne de respect lorsqu’elle satisfait aux conditions de sincérité, d’équité, de savoir et de convenance, devient ou un métier avilissant par la manière dont il est rempli, ou un acte de dévouement chevaleresque en raison des persécutions qu’il attire à quiconque veut demeurer consciencieux et indépendant. Pour ma part, je ne me suis jamais soucié du métier, ayant, grâce à Dieu, autre chose à faire ; quant à l’héroïsme, je commence à m’en lasser ; j’aime autant, entre nous soit dit, le réserver pour d’autres occurrences. Lorsque le critique n’est point artiste, lorsqu’il ne pratique pas ce qu’il prétend enseigner, alors et avec une grande apparence de raison, on décline son autorité, on lui nie la faculté d’apprécier et de juger les résultats, à lui qui ignore les procédés, et s’il lui arrive d’être sévère, on se