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petite[1] quotidienne étude et de travail personnels. N’ayant rien à chercher dans le présent de l’Italie, je me suis mis à fouiller son passé ; n’ayant que peu de choses à demander aux vivants, j’ai interrogé les morts. Un vaste champ s’est ouvert à moi. La musique de la chapelle Sixtine, cette musique qui va s’altérant, s’effaçant de jour en jour avec les fresques de Raphaël et de Michel-Ange, m’a conduit à des recherches du plus haut intérêt. Une fois engagé dans cette voie, il m’a été impossible de me borner, de m’arrêter ; je n’ai point voulu vous envoyer quelques jugements fragmentaires sur toute cette grande école de musique sacrée qui nous est trop peu connue ; j’ai attendu. Trop de choses me sollicitaient en même temps, les heures étaient trop courtes, l’étude trop vaste. Il fallait voir, entendre, méditer avant d’écrire. Le beau, dans ce pays privilégié, m’apparaissait sous ses formes les plus pures et les plus sublimes. L’art se montrait à mes yeux dans toutes ses splendeurs ; il se révélait à moi dans son universalité et dans son unité. Le sentiment et la réflexion me pénétraient chaque jour davantage de la relation cachée qui unit les œuvres du génie. Raphaël et Michel-Ange me faisaient mieux comprendre Mozart et Beethoven. Jean de Pise, Fra Beato, Francia m’expliquaient Allegri, Marcello, Palestrina ; Titien et Rossini m’apparaissaient comme deux astres de rayons

  1. Sic : dans le texte : il faut lire sans doute : une petite heure de quotidienne étude, etc.