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l’exactitude et de comparer les deux architectures, le gothique altéré de la façade du dôme avec l’ostrogothique de ma construction musicale. J’eusse voulu de grand cœur lui procurer cette satisfaction esthétique, le mettre à même de confirmer ou de réfuter l’assertion de l’illustre écrivain ; mais le public ne témoignant nul empressement à voir s’élever mes clochetons de triples croches, mes galeries de gammes, et mes aiguilles de dixièmes, je passai outre. De mieux en mieux, de plus fort en plus fort : un honnête citoyen préoccupé du mouvement progressif de l’industrialisme, et frappé de l’avantage qu’il y aurait à se transporter en six heures de Milan à Venise, me donnait pour thème : La Strada di ferro. Pour celui-là, je ne voyais d’autre moyen de le traiter que par une suite non interrompue de gammes glissées de haut en bas du piano ; et, craignant de me briser les poignets dans cet assaut de vélocité avec les wagons, je me hâtai d’ouvrir un dernier billet. Que pensez-vous que je trouve cette fois ? une des plus importantes questions de la vie humaine à résoudre en arpèges ; une question qui, traitée avec quelque étendue, peut s’attaquer à tout, à la religion aussi bien qu’à la physiologie, à la philosophie aussi bien qu’à l’économie politique : Vaut-il mieux être marié que garçon ? Ne me sentant capable de répondre à cette question que par un interminable soupir, je préférai rappeler à mes auditeurs ce que dit un sage : « Quelque détermination que l’on prenne, que