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s’éloignant tour à tour ; une multitude de villas se mirent dans les eaux. En face de nous est la villa Sommariva où nous trouvons une Lise Joconde, la troisième prétendue originale, et un magnifique bas-relief de Thorwaldsen, représentant le triomphe d’Alexandre. Ce bas-relief qui a coûté un million, est plutôt remarquable par les détails que par l’effet de l’ensemble. On pourrait peut-être reprocher à l’artiste une sorte de parcimonie dans la composition ; le nombre des personnages qui forment les différents groupes du cortège est singulièrement restreint : un pêcheur à la ligne commence la série de ces groupes ; puis vient une barque de transport, trois personnages représentent les peuples sur les murailles de Babylone ; puis viennent deux musiciens, etc., etc. Ainsi que j’ai déjà eu occasion de le remarquer dans plusieurs de ses ouvrages, Thorwaldsen excelle surtout dans les figures au repos, dans les têtes de vieillards, la nature de son talent est calme et noble. Dans ce bas-relief la figure du fleuve le Tigre et les têtes des mages sont extrêmement belles ; mais les figures plus mouvementées, et malheureusement aussi celle d’Alexandre, ne répondent point à la perfection des premières. Cette grande œuvre de la sculpture antique, une Andromède et quelques statues de Canova, dédommagent amplement le voyageur enthousiaste du désappointement qu’il a éprouvé dans les jardins où l’asperge et le navet montrent insolemment leurs tiges utilitaires aux endroits privilégiés où l’on