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un homme tel que lui. Alors il nagea en pleine eau, et se sentait à la hauteur de sa position ; il entama sans détours, ni périphrases, les questions littéraires. Il approuva fort le mariage de Simon avec Fiamina ; celui de Bernard Mauprat avec Edmée ; dit que Jacques était son propre portrait et qu’il s’était reconnu à chaque page. Puis il avoua n’avoir pas bien saisi le symbole de Lélia, et demanda à l’auteur par quel motif il n’avait donc pas conclu. Mme Cramer, qui concluait en cet instant qu’elle avait affaire à un sot fieffé, l’ajourna pour plus amples explications à leur prochaine entrevue, et prit la parole à son tour. Elle vanta beaucoup les romans de M. de Balzac, en regrettant toutefois qu’ils ne fussent pas un tant soit peu plus moraux ; puis, avec un aplomb dédaigneux, qui faillit nous faire éclater de rire, elle s’éleva violemment contre le papillotage hebdomadaire d’un certain vicomte d’Hantuez, gentilhomme sans blason, déclarant ne jamais lire, ni sa prose, ni ses vers, attendu que ce n’était là, après tout, que de la littérature de femme de chambre. En ce moment, les enfants entrèrent. Le précepteur rendit compte des études de la matinée. Mme Cramer distribua l’éloge et le blâme, en terminant par un fort beau discours sur les avantages de l’application et la nécessité de l’obéissance.

L’avocat restait bouche béante, abasourdi de tant d’éloquence. Il trouvait que deux ou trois dents de moins et quelques boucles de cheveux gris n’allaient