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III[1]

À M. ADOLPHE PICTET[2]

Où je vais ? Ce que je deviens ? Le sais-je ? J’irai toujours tout droit comme disent les paysans ; car les droits chemins sont les bons chemins. Je deviendrai ce qu’il plaira à Dieu ; point ne m’en mets en grand souci. À tout hasard, je compte sur la Providence. Pour aujourd’hui, parlons plutôt de ce que je suis devenu depuis que nous n’avons causé, les pieds sur les chenets, les coudes sur vos Védas. Quand je dis causé, je me comprends ; c’est-à-dire que vous qui savez tout, et moi qui ne sais rien, nous faisons un fonds commun d’idées et nous vivons sur ce fonds métaphysique durant des journées entières. Bref, de quelque façon qu’on l’entende, depuis que nous n’avons causé, depuis que vous avez quitté Paris, pour retrouver votre

  1. Gazette musicale, 11 février 1838.
  2. Adolphe Pictet (1799-1875) écrivain et linguiste suisse ; il accompagna George Sand, Mme d’Agoult et Liszt, en 1837, dans un voyage en Savoie et en Suisse.