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une autre réunion musicale, plus profane, et par cela même plus amusante ; le concert donné au bénéfice des pauvres et des réfugiés par le prince Belgiojoso et F. Liszt.

Vous eussiez ri de voir nos deux noms figurer en gros caractère sur de monstrueuses affiches d’un jaune éclatant[1] qui attirèrent pendant plusieurs jours de nombreux groupes de badauds, empressés de savoir à quel titre et en vertu de quoi on venait impertinemment leur demander la somme de cinq francs, tandis que de temps immémorial on se procurait à raison de trois francs et moins toute la dose d’harmonie voulue pour passer agréablement une soirée et s’endormir après sans crainte de cauchemar ou de mauvais rêves. La curiosité, la charité

Quelque diable aussi les poussant,

il y eut à notre concert une affluence considérable et qui offrait à un haut degré pour l’observateur attentif l’attrait du pittoresque social.

Le canton de Genève à peine visible sur les atlas,

  1. Pour vous donner une idée de l’habileté avec laquelle les artistes qui se font voir et entendre à Genève, amorcent la curiosité publique, je vous transcris littéralement un avis que je lus au bas d’un programme sur toutes les murailles en arrivant ici, et qui me fit désespérer de pouvoir jamais réaliser avec une rédaction aussi élégante, une semblable poésie de style.

    Avis. « Le public, souvent en garde contre des annonces fastueuses, a pu être trompé quelquefois, par une coupable déception ; ici, ce que l’on voit, ce que l’on entend est encore au-dessus des promesses de l’artiste, et des espérances de l’amateur. » (Note de Liszt.)