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temps anciens par la lyre trois fois sainte, avec le rôle stérile et misérable auquel on semble vouloir la borner aujourd’hui.

Cependant, puisque vous êtes du nombre de ceux qui ne désespèrent point de l’avenir, quelle que soit la mesquinerie du présent, puisque d’ailleurs vous me demandez de vous communiquer mes observations de voyageur telles quelles, et que la spécialité de la Revue qui me sert d’intermédiaire exclut les divagations politiques et métaphysiques, dont nous nous amusions tant au coin du feu, dans votre atmosphère si fumante de gloire et de tabac turc, je veux (en attendant qu’il me soit permis de vous parler du Stabat Mater de Pergolèse et de la Chapelle sixtine) vous tenir au courant du peu de faits intéressants qui se rattachent à la chronique musicale de Genève, la Rome protestante.

J’y débarquai précisément la veille d’une fête séculaire que l’on y célèbre en l’honneur de la réforme de Calvin. Cette fête dure trois jours entiers. Le premier est consacré aux enfants, par l’autorité toute paternelle du canton. Je me sentis épanouir le cœur à les voir s’éparpiller dans les jardins comme une nuée de sauterelles ; courant, riant, bondissant, se culbutant et faisant de leur mieux la critique de l’abstinence catholique en avalant force vacherin et tourtes à la frangipane.

Le second jour plus spécialement religieux, se célèbre dans l’intérieur du temple de Saint-Pierre. Ce temple fut, jusqu’au mois d’août 1535, époque