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un vœu d’exécrable blasphème, comme dans un antre obscur où des milliers de gémissemens pareils, le convoitent et l’appellent par de lascives séductions. Dans la dernière narration du Lohengrin, sa personnalité au contraire se détache de plus en plus comme les contours d’un corps glorieux, sur un fond d’or. Un caractère de vaillance, de fortitude, de sainte et pure fierté, de puissance et d’intelligence surpassant les facultés de l’homme, révèle à notre contemplation ravie, la nature de cet angélique héros, de cet envoyé divin, de cet immortel invulnérable à toute blessure et à toute faiblesse, mais non exempt des suprêmes peines, des infinies tristesses, des impérissables regrets de l’amour.

Ces peines, ces tristesses, ces regrets s’expriment ensuite avec une poignante émotion, lorsque Lohengrin en pressant Elsa une dernière fois sur son cœur qu’elle a méconnu, lui dit : « que si un jour son frère revenait près d’elle, elle devait lui remettre son glaive qui le rendrait toujours victorieux, son cor qui le sauverait de tout danger, sa bague qu’il porterait en mémoire de lui, de lui qui avait sauvé sa sœur de l’ignominie et de la mort ». Dans les accens de cet épanchement résigné mais inconsolé d’une irrémédiable peine, de cet entier abandon à un amer navrement, il régne une souffrance qu’on dirait se savourer elle-même avec douceur, et Wag-