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L’Allemagne ressemblait à un domaine dévasté par la guerre, où les anciens propriétaires, rentrés dans leurs droits et redevenus maîtres de leurs biens, sont à la veille de se réinstaller. Les uns demandaient le rétablissement de l’ordre de choses antérieur avec tout son vieux bagage et toutes ses friperies ; les autres, des institutions rationnelles et des instruments tout neufs. Ceux qui écoutaient à la fois la voix de la raison et celle de l’expérience, désiraient un moyen terme entre les prétentions anciennes et les besoins nouveaux. Partout régnaient la contradiction, la lutte entre des opinions diverses, partout se formaient des associations pour la poursuite de buts patriotiques. La constitution fédérale elle-même était une forme nouvelle, tracée la hâte, considérée, même par des diplomates éclairés et réfléchis, comme un embryon, dont le développement à l’état de corps bien organisé était voulu par ses propres auteurs, mais laissé aux progrès du temps. Un article, le dix-neuvième, avait expressément réservé l’organisation d’un système de commerce national. Je vis dans cet article la base sur laquelle il fallait fonder la prospérité industrielle et commerciale de ma patrie allemande, et alors je conçus l’idée de créer une association de fabricants et de négociants[1], ayant

  1. Dans les premières éditions du Conversation’s-Lexicon (Dictionnaire de conversation), M. J.-M. Elch, de Kaufbeuren, est nommé comme le fondateur de cette association ; quant à moi, non-seulement on ne m’attribue qu’une part très subalterne dans sa création et dans ses travaux, mais encore on me reproche d’avoir, dans la conduite de ses affaires, commis de grandes négligences. Lorsque, de retour dans mon pays, je m’enquis de l’auteur de cet article, on me cita un nom qui m’expliqua tout : c’était celui d’un homme qui a de grandes obligations envers J.-M. Elch, et dont le rôle personnel, dans cette affaire, paraît d’autant plus grand que mien est plus rapetissé. Peu tourmenté par l’ambition, je n’ai pas cru devoir prendre la peine de réclamer contre l’article. Mais récemment je me suis vu dans l’absolue nécessité d’en entretenir le public. On sait qu’il y a peu de temps la faculté de droit d’Iéna m’a honoré du diplôme de docteur ; le correspondant de la Gazette d’Augsbourg à Iéna avait fait, à cette occasion, la remarque que, le premier, j’avais émis l’idée d’une association des états allemands dans un même système de douane. La rédaction de la Gazette reçut la réclamation suivante :
            « La note écrite d’Iéna, le 1er décembre 1840, à la Gazette d’Augsbourg, d’après laquelle M. Frédéric List aurait émis la première idée de la liberté