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A la suite de son séjour au milieu des Magyars, il écrivit sur la Hongrie un mémoire, où nous lisons ces lignes en partie prophétiques : « Quand même nous n’aurions en perspective ni révolution, ni guerre européenne, il existe en France trop de mécontentement et d’irritation pour qu’il n’y ait pas lieu de craindre du moins des troubles sérieux à la mort du roi. Ces troubles tourneraient soudainement du côté de l’Ouest toute l’attention de l’Autriche et de la Prusse. Supposons que la plaie de la Hongrie reste encore ouverte, rien ne serait plus naturel que de voir l’opposition hongroise saisir cette occasion favorable d’élever les plus hautes prétentions vis-à-vis du gouvernement autrichien réduit aux abois. Ce serait alors pour la Russie le moment propice d’intervenir entre l’Autriche et la Hongrie. »

List était alors à l’apogée de son influence ; il répandait partout la vie autour de lui ; il était comme le centre auquel tous les grands intérêts du pays aboutissaient ; il était, comme on l’a appelé, l’Agent général de l’Allemagne (der Allgemeine deutsche consulent) ; mais, malgré quelques témoignages de la sympathie publique, sa situation personnelle restait toujours la même. En remerciant des industriels qui lui avaient adressé un présent, il écrivait avec tristesse : « Lorsqu’en 1818 je me mis à la tête de cette Société de commerce d’où est né le Zollverein, j’avais une belle fortune, et de plus une place qui me donnait un honnête revenu et n’assurait un avenir administratif. Mes efforts dans l’intérêt de l’industrie allemande ont eu pour conséquence la perte, non-seulement d’une grande partie de ma fortune, mais encore de mon emploi, de ma carrière, enfin de mon pays. À mon retour d’Amérique, en 1831, j’étais redevenu riche. En travaillant pour les chemins de fer et pour une politique commerciale allemande, j’espérais avoir bien mérité de mon pays et conserver au moins ma fortune. Pour prix de mon zèle, j’ai été persécuté et j’ai perdu une grande partie de ce que j’avais. Aujourd’hui, près de la soixantaine, et affligé d’infirmités physiques, je ne vois l’avenir qu’avec inquiétude ; je ne me