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quel l’administration change avec la personne du monarque, qui assurent, ainsi qu’Antonio Serra le remarque avec raison, cette stabilité administrative. Il existe, d’ailleurs, des degrés de culture où le gouvernement absolu peut être beaucoup plus favorable et l’est généralement, en effet, aux progrès matériels et moraux du pays, que ne le serait le gouvernement constitutionnel. Ce sont les périodes de l’esclavage et du servage, de la barbarie et de la superstition, du morcellement national et des privilèges de caste. Car alors la constitution garantit la durée, non pas seulement aux intérêts nationaux, mais encore aux abus dominants, tandis qu’il est dans l’intérêt du gouvernement absolu et dans sa nature d’extirper ces abus, et qu’il peut faire arriver au pouvoir un monarque de grande énergie et de grandes lumières, qui fasse avancer la nation de plusieurs siècles et lui ouvre une ère indéfinie d’indépendance et de progrès.

Ainsi, c’est à l’aide d’un lieu commun, qui ne renferme qu’une vérité relative, que J.-B. Say a voulu séparer sa doctrine de la politique[1]. Sans doute il s’agit avant tout pour un pays d’être bien administré ; mais la bonté de l’administration dépend de la forme du gouvernement, et la forme du gouvernement la meilleure est évidemment celle qui répond le mieux à la situation morale et matérielle du pays, aux intérêts de son avenir. On a vu les nations avancer sous toutes les formes de gouvernement, mais on ne les a vues atteindre un haut degré de développement économique, que là où la forme du gouvernement garantissait un haut degré de liberté et de puissance, la stabilité dans les lois et dans la politique et de bonnes institutions.

Antonio Serra voit la nature des choses telle qu’elle est, et

  1. Bien que la recherche de la meilleure forme de gouvernement rentre dans le domaine de la science politique, il appartient cependant à la science économique d’expliquer en quoi la forme de gouvernement influe sur la production et sur la distribution de la richesse. C’est probablement par réaction contre les physiocrates ses prédécesseurs que J.-B. Say s’est abstenu à cet égard ; il aura voulu séparer nettement deux études qu’ils avaient à tort confondues. (H. R.)