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    surpassent de beaucoup l’inconvénient passager d’une augmentation dans le prix des marchandises. »
      Cet écrit de M. Doenniges a provoqué une réponse importante d’un savant qui jouit en Allemagne d’une grande considération, M. de Hermann, de Munich. La citation suivante fait connaître le point de vue auquel s’est placé le professeur bavarois : « Du moment où le sentiment national s’est éveillé chez lui, un peuple veut, autant que possible, se suffire à lui-même et s’élever au niveau des autres nations indépendantes. Le concitoyen qui supporte les mêmes charges publiques que nous, peut réclamer une préférence vis-à-vis de l’étranger ; le complet développement des forces productives du pays peut exiger qu’on protège les industries pour lesquelles le pays est parfaitement préparé, mais qu’il ne saurait entreprendre ou pousser en concurrence avec l’étranger qui a pris les devants ; enfin une nation ne peut, sans encourir le mépris du monde et en même temps de graves dommages matériels, supporter un mouvement rétrograde et de l’inégalité dans ses relations commerciales. L’histoire des peuples modernes atteste la justesse de ces observations. Le degré de la préférence et de la protection accordée à l’habitant du pays, les mesures employées par les États pour maintenir leur indépendance vis-à-vis des autres États, ont varié ; l’idée mère est partout la même, et son influence s’est fait sentir bien avant qu’on eût cherché à se rendre compte de ce que c’est que le commerce international. Le système mercantile n’a été que le premier essai de son explication scientifique. On a démontré suffisamment que ce système était défectueux, qu’une bonne analyse du commerce lui manquait, et que ses conceptions inexactes ont induit les gouvernements dans de fausses mesures. Mais, l’idée du développement le plus complet possible de l’économie intérieure d’une nation et d’une entière égalité dans ses rapports avec les autres nations, le système mercantile ne l’a point inventée ; il a essayé seulement de l’expliquer et de l’élaborer. La réfutation qu’on en a faite n’a point fait disparaître une exigence de l’indépendance nationale ; la théorie moderne n’a pas réussi à la supprimer ; la même exigence est restée jusqu’ici la règle de la législation commerciale de tous les États indépendants, et elle ne cesse de prévaloir, parce qu’elle répond à une nécessité profonde des peuples et des États. C’est à la science à la ramener dans ses justes limites et à rechercher jusqu’à quel point une nation peut être économiquement indépendante sans porter aucun trouble dans l’économie des particuliers, et comment la libre activité des individus peut être conciliée avec cette exigence du sentiment national et de l’honneur national. »
      M. Rau, dans la dernière édition de son Traité d’économie politique, Ier vol., reproche à tort à l’auteur du Système national de placer l’industrie manufacturière bien au-dessus de l’agriculture ; c’est le degré de civilisation où les manufactures fleurissent à côté de l’agriculture que List préfère à celui où l’agriculture existe seule et dans un état fort imparfait ; mais M. Rau admet que, dans certains cas et sous certaines conditions, la théorie justifie la protection du travail du pays.
      M. Roscher, qui occupe aujourd’hui un des premiers rangs parmi les économistes de l’Allemagne, a publié, entre autres ouvrages, un écrit intitulé : Du commerce des grains et des mesures en cas de cherté. J’emprunterai à cet