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En matière de droits protecteurs, il convient de distinguer si une nation veut passer de l’état de libre concurrence au système protecteur, ou de la prohibition à une protection modérée ; dans le premier cas, les droits doivent être faibles au commencement et s’élever ensuite peu à peu ; dans le second, ils doivent être d’abord très-élevés, puis décroître insensiblement. Un pays où les droits ne sont pas suffisamment protecteurs, mais qui se sent appelé à de grands progrès dans les manufactures, doit songer avant tout à encourager les industries qui produisent les articles d’une consommation générale. D’abord la valeur totale de ces articles est incomparablement plus forte que celle des objets de luxe, beaucoup plus chers cependant. Cette fabrication met donc en mouvement des masses considérables de forces productives naturelles, intellectuelles et personnelles, et, comme elle exige de grands capitaux, elle provoque d’importantes épargnes et attire de l’étranger des capitaux et des forces de toute espèce. Elle exerce, en grandissant, une influence puissante sur l’accroissement de la population, sur la prospérité de l’agriculture, et, particulièrement, sur le développement du commerce extérieur, par la raison que les pays moins civilisés réclament avant tout, des produits fabriqués d’un usage général, et que les contrées de la zone tempérée trouvent dans la production de ces articles le principal moyen d’entretenir des relations directes avec celles de la zone torride. Un pays, par exemple, qui importe des fils et des tissus de coton, ne peut commercer directement avec l’Égypte, la Louisiane ou le Brésil, car il ne peut ni fournir à ces contrées des tissus de coton ni leur acheter leurs cotons en laine. Ces articles contribuent fortement, par le chiffre considérable de leur valeur collective, à assurer un équilibre convenable entre les importations et les exportations du pays, à conserver ou à procurer au pays les moyens de circulation qui lui sont nécessaires. C’est, en outre, par l’acquisition et par le maintien de ces vastes industries que la nation conquiert et conserve son importance industrielle ; car les interruptions de commerce que la guerre