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l’accroissement du capital matériel de la nation est dû principalement aux valeurs et aux forces employées dans les manufactures, parce qu’une quantité considérable de forces naturelles et intellectuelles, jusque-là inutiles, sont transformées ainsi en capitaux matériels et intellectuels. Bien loin de faire obstacle à l’épargne matérielle, la création des manufactures fournit à la nation le moyen de placer avantageusement ses économies agricoles, c’est pour elle un stimulant à ces économies.

Dans les assemblées législatives de l’Amérique du Nord, on a fréquemment répété que, faute de débouché, le blé pourrit sur sa tige, parce qu’il ne vaut pas les frais de la moisson. On assure qu’en Hongrie l’agriculteur étouffe, pour ainsi dire, dans l’abondance, tandis que les articles manufacturés y coûtent trois ou quatre fois plus qu’en Angleterre. L’Allemagne elle-même peut se rappeler un pareil état de choses.

Dans les pays purement agriculteurs, tout excédant des produits ruraux ne constitue donc pas un capital matériel. Ce n’est qu’à l’aide des manufactures qu’il devient, par l’accumulation dans les magasins, un capital commercial, et, par la vente à la population manufacturière, un capital manufacturier. Ce qui, entre les mains des agriculteurs, serait une provision inutile, dévient un capital productif entre celles des manufacturiers et réciproquement.

La production rend la consommation possible, et le désir de consommer excite à produire. Le pays purement agricole dépend, pour sa consommation, de la situation des pays étrangers, et, quand cette situation ne lui est pas favorable, la production qu’avait provoquée le désir de consommer est anéantie. Mais, dans la nation qui réunit sur son territoire l’industrie manufacturière et l’agriculture, l’excitation réciproque ne cesse d’exister, et ainsi l’accroissement de la production continue des deux côtés ainsi que celui des capitaux.

La nation à la fois agricole et manufacturière étant toujours, par des causes déjà exposées, beaucoup plus riche en capitaux matériels que la nation purement agricole, ce qui, du reste, frappe les yeux, le taux de l’intérêt y est toujours beau-