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et d’esprit, pour éveiller et pour entretenir leurs plus nobles sentiments, un mobile auquel le genre humain doit la plus grande partie de ses progrès. Elle érige en loi l’égoïsme le plus sec, elle demande que nous fermions notre cœur à ceux qui ont faim, parce qu’en leur donnant à manger et à boire, nous serions causes que dans trente ans peut-être un autre serait affamé. Elle met le calcul à la place de la pitié. Une telle doctrine changerait les cœurs des hommes en pierres, et qu’attendre d’un peuple où les citoyens porteraient dans leurs poitrines des pierres au lieu de cœurs, sinon la ruine complète de la morale, et avec elle des forces productives, par suite de toute la richesse, de toute la civilisation, de toute la puissance du pays ?

Si, chez une nation, la population dépasse la production des subsistances, si les capitaux finissent par s’accumuler tellement qu’ils ne trouvent plus d’emploi dans le pays, si les machines mettent une multitude d’individus sur le pavé, si enfin les produits fabriqués encombrent les magasins, c’est une preuve que la nature n’a pas voulu que l’industrie, la civilisation, la richesse et la puissance fussent le partage exclusif d’un seul peuple, lorsqu’une portion considérable des terres susceptibles de culture n’est habitée que par des animaux sauvages, et que la plus grande partie de l’espèce humaine est plongée dans la barbarie, dans l’ignorance et dans la misère.

Nous venons de montrer dans quelles erreurs est tombée l’école en envisageant du point de vue politique les forces productives du genre humain. Signalons maintenant celles qu’elle a commises en considérant du point de vue cosmopolite les intérêts particuliers des nations. S’il existait, en effet, une confédération des peuples telle que celle des États-Unis de l’Amérique du Nord, le trop-plein de population, de talents, de capacités industrielles et de capital matériel refluerait de l’Angleterre sur le continent, de même qu’il reflue des États orientaux de l’Union américaine sur les États occidentaux, bien entendu sous la condition que les pays du continent of-