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cès, avec plus ou moins de rapidité, suivant que les moyens employés avaient été choisis avec plus ou moins de discernement et appliqués avec plus ou moins d’énergie et de suite.

L’Angleterre, particulièrement, a recouru à cette politique. Mais, des monarques inintelligents ou livrés à leurs passions, des troubles intérieurs ou des guerres étrangères en ayant interrompu fréquemment l’application, ce ne fut qu’à la suite des règnes d’Édouard VI et d’Élisabeth et de ses révolutions qu’elle eut un système arrêté et approprié au but. Car quelle efficacité pouvaient avoir les mesures d’Édouard III, lorsque, jusques à Henri VI, on ne permettait ni la circulation du blé d’un des comtés de l’Angleterre dans l’autre, ni son exportation à l’étranger ? Lorsque, encore sous Henri VII et sous Henri VIII, toute espèce d’intérêt, jusqu’aux profits du change, était réputée usure, et qu’on croyait encourager les métiers en taxant très-bas les tissus de laine et les salaires, la production du blé en restreignant les grands troupeaux de moutons ? Et combien la fabrication des laines et la navigation de l’Angleterre n’auraient-elles pas atteint plus tôt un haut degré de prospérité, si Henri VIII n’avait pas considéré comme un mal la hausse du prix du blé, si, au lieu de chasser du pays en masse les ouvriers étrangers, il avait, à l’exemple de ses prédécesseurs, cherché à en attirer un plus grand nombre, si Henri VII n’avait pas rejeté l’acte de navigation qui lui avait été proposé par le parlement !

En France nous voyons les manufactures, la libre circulation au dedans, le commerce extérieur, les pêcheries, la marine marchande et militaire, en un mot tous les attributs d’une nation grande, puissante et riche, que l’Angleterre n’avait réussi à acquérir que par des siècles d’efforts, surgir en quelques années, comme par enchantement, à la voix d’un grand génie, mais disparaître plus promptement encore sous la main de fer du fanatisme religieux et du despotisme.

Nous voyons le principe du libre commerce lutter sans succès, dans des circonstances défavorables, contre la restriction revêtue de la puissance ; la Hanse est anéantie et la Hol-