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rier en Angleterre, cet échange sera fréquemment interrompu par la guerre, par des crises commerciales ou par des mesures restrictives adoptées à l’étranger ; que, par conséquent, pour asseoir sur une base solide la prospérité du pays, le manufacturier, suivant l’expression de Jefferson, doit s’établir à côté de l’agriculteur.

Les Américains du Nord comprenaient enfin qu’une grande nation ne doit pas poursuivre exclusivement des avantages matériels immédiats ; que la civilisation et la puissance, qui, comme Adam Smith le reconnaît, sont des biens plus précieux et plus désirables que la richesse matérielle, ne sauraient être acquises et maintenues qu’à l’aide de l’industrie manufacturière ; qu’une nation qui se sent appelée à prendre le rang parmi les plus cultivées et parmi les plus puissantes, ne doit reculer devant aucun sacrifice pour posséder la condition de ces biens, et que, cette condition, les États voisins de l’Atlantique la possédaient.

C’est sur les rivages de l’Atlantique que la population et la civilisation européenne ont pris pied d’abord ; c’est là que se sont formés d’abord des états populeux, cultivés et riches ; là est le berceau des pêcheries maritimes, de la navigation côtière et des forces navales du pays ; là fut conquise son indépendance, et sa fédération fut fondée ; c’est par ces États du littoral qu’a lieu son commerce extérieur : par eux il est en contact avec le monde civilisé, par eux il reçoit le trop-plein de l’Europe en population, en capital matériel et en ressources morales ; c’est sur la civilisation, sur la puissance et sur la richesse de ces États que repose l’avenir de civilisation, de puissance et de richesse de toute la nation, son indépendance et sa future influence sur les pays moins avancés.

Supposons que la population de ces États du littoral diminue au lieu de s’accroître, que leurs pêcheries, leur cabotage, leur navigation avec l’étranger, leur commerce extérieur, que leur prospérité enfin décroisse ou reste stationnaire au lieu d’augmenter, nous verrons s’amoindrir dans la même proportion les moyens de civilisation de tout le pays, les garan-