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venait se reposer des soucis du pouvoir, en compagnie de jeunes vestales, recrutées dans la légion des pétroleuses.

Au surplus, cette Mairie était transformée en phalanstère, et la nuit où y entra le général de Langouriau. — celui-là même qui fut, avec le général Chanzy, traîtreusement arrêté en wagon par ordre de la Commune et gardé prisonnier pendant quelques jours, — elle offrait un spectacle aussi étrange que repoussant.

Chaque couple avait fui de sa chambre en plein désarroi, et ils étaient nombreux, presque toutes les pièces de ce vaste édifice ayant été transformées en chambres à coucher ! Ce n’était partout, sur le parquet, sur les meubles, dans les lits défaits, que faux chignons rancis, jupons jaunis, corsets défraîchis ; restes de victuailles, fonds de bouteilles, débris et maculatures de toute espèce de l’orgie, habituelle de la soirée. Les soldats durent immédiatement procéder au nettoyage et à la désinfection de la Mairie, pour la rendre accessible sans trop de péril pour la vue et l’odorat.

Delescluze, l’Erostrate-Marat, qui vient de « faire à la liberté des funérailles dignes d’elle, » avait donc sa petite maison dans ce lieu de délices, et la maîtresse du sieur Verdure, autre élu du XIe arrondissement, laquelle avait été nommée « déléguée » à l’Orphelinat de la rue Oberkamph, employait son importance nouvelle à tout ce qui pouvait procurer d’agréables distractions aux grands hommes de la Commune.

Ces faits étaient déjà connus et presque publics. Or, voilà qu’on vient d’en découvrir, sur leur théâtre même, une de ces preuves irrécusables qui appartiennent à l’histoire et à la conscience publique, et que nous rapportons dans sa nudité révélatrice.

Voici comment la matrone infâme chargée, ne l’oublions pas, de la direction d’une maison de jeunes orphelines de tout âge, la fille de joie accouplée au