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jeunes fusiliers du boulevard Voltaire s’en vantèrent devant nous. Ces brutes, qui sans raison ni prétexte faisaient rouler sous leurs balles le premier venu dans la rue, n’en étaient pas à quelques galanteries près, et devant nous ils en racontèrent les détails.

Quelles méprises eurent lieu dans cet ouragan de massacres ! Le 26, vers deux heures de l’après-midi, un individu assez bien mis qui passait sur l’avenue de la Bourdonnaye fut entouré par la foule qui se mit à crier : « C’est Billioray, membre de la Commune ! »

Une patrouille du 6e de ligne, qui passait dans ce quartier, arrêta l’individu et le conduisit à l’Ecole militaire. La foule suivait, hurlant toujours : « C’est Billioray ! »

Le malheureux avait beau protester, les clameurs couvraient sa voix.

L’officier devant lequel il fut conduit, convaincu de son identité par tant de témoignages différents, ordonna son exécution immédiate.

— Mais je vous jure que je ne suis pas Billioray, protestait l’infortuné ; je suis Constant. J’habite tout près d’ici, au Gros-Caillou ; allez plutôt le demander aux voisins.

— Il ment, le lâche, vociféraient les assistants ; c’est bien Billioray. nous en sommes sûrs.