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en heure. La vie des citoyens ne pèse pas plus qu’un cheveu dans la balance populaire. Pour un oui, pour un non, arrêté, fusillé ! »

On vit alors apparaître en costume correct, avec, des brassards tricolores et des allures féroces, ces gardes nationaux du parti de l’ordre, qui, pendant le danger, cachés et courbant la tête, se bornaient à faire des vœux pour l’entrée des Versaillais. On les vit disputer aux soldats l’honneur des exécutions. Le jeudi, ceux du Ier arrondissement crurent reconnaître rue de la Paix, le commandant Brunel, caché chez une dame, et ils le fusillèrent dans l’appartement même, ainsi que celle qui lui avait donné asile. Les scellés furent ensuite apposés sur la porte, et la malheureuse, qui vivait encore, agonisa pendant plusieurs heures à côté du cadavre du prétendu Brunel[1].

Quant aux soldats, tout blessé à terre était immédiatement achevé, et ils regardaient quiconque leur donnait des soins comme méritant le même sort. Le même jour, 25 mai, le docteur Faneau étant de garde au grand séminaire de

  1. Trois mois plus tard, la cour martiale de Versailles condamna Brunel à mort, par contumace. Et en effet, il avait pu gagner l’étranger.