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qu’après la victoire, c’est-à-dire après l’arrivée de l’armée de Metz. Les bagages du quartier général de Versailles étaient déjà sur les voitures ; il ne restait plus qu’à « atteler les chevaux », a dit un témoin oculaire, le colonel suisse d’Erlach.

D’Aurelles ne remue pas. La Délégation aussi paralytique que lui se contente d’échanger des lettres de délégué à ministre : « Monsieur le ministre, écrit le 4 novembre Freycinet, depuis quelques jours, l’armée et moi-même ignorons si le Gouvernement veut la paix ou la guerre… Au moment où nous nous disposons à accomplir des projets laborieusement préparés, des bruits d’armistice jettent le trouble dans l’âme de nos généraux ; moi-même, si je cherche à remonter leur moral et à les pousser en avant, j’ignore si, demain, je ne serai pas désavoué ». Gambetta répond : « Monsieur le délégué, je constate avec vous la détestable influence des hésitations politiques du Gouvernement… Il faut arrêter dès aujourd’hui notre marche en avant » et le 7, d’Aurelles est encore immobile. Le 8, il s’ébranle, fait une quinzaine de kilomètres, le soir parle de s’arrêter. Ses forces réunies dépassent cent mille hommes. Le 9, il se décide à attaquer les Bavarois à Coulmiers. Les Bavarois évacuent immédiatement Orléans et se retirent sur Toury. Loin de les poursuivre, d’Aurelles annonce qu’il va se fortifier devant la ville. La Délégation le laisse faire et Gambetta, qui vient au quartier général, approuve son plan. En attendant, deux divisions prussiennes (3e et 4e), expédiées de Metz par chemin de fer, étaient déjà arrivées devant Paris, ce qui permit à de Moltke de diriger la 17e division prussienne sur Toury où elle arriva le 12. En outre, trois corps de l’armée de Metz s’approchaient de la Seine à marche forcée. Grâce à l’inaction voulue de d’Aurelles, à la mollesse de la Délégation, l’armée de la Loire cessait de donner de l’inquiétude aux Allemands.

Il fallut bien enfin le destituer ce d’Aurelles, mais l’occasion unique était perdue ; l’armée de la Loire, coupée en deux, lutta avec Chanzy, seulement pour conserver l’honneur. La Délégation dut se transporter à Bordeaux.

À la fin de novembre, il fut évident qu’on pataugeait.