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le déplacer. Le mot d’ordre des goutteux fut maintenu : conserver. Sauf quelques juges de paix et un petit nombre de magistrats, il n’y eut de changé que le haut personnel politique.

À la Guerre même on toléra des adversaires. Les bureaux, longtemps sous la direction du bonapartiste Loverdo, minèrent sourdement la Délégation ; l’amiral Fourichon put disputer les troupes de marine ; les Compagnies de chemins de fer furent maîtresses des transports. On alla jusqu’à supplier le représentant de la Banque de France qui ne donna que ce qu’il voulut. Certains départements votèrent un emprunt forcé et dans des proportions où le recouvrement était possible ; Gambetta refusa d’homologuer leurs décisions ; la France eut l’humiliation d’aller faire un emprunt de guerre à Londres.

La Défense en province partit sur ces deux béquilles : un personnel sans ressort, la conciliation énervante. Malgré tout les bataillons se levaient. À la voix du croyant, sous l’active impulsion de Freycinet, son délégué technique, les débris de troupes se rejoignaient, les dépôts vidaient leur réservoir, les mobiles accouraient ; vers la fin d’octobre, une véritable armée était en formation à Salbris, non loin de Vierzon, munie de bonnes armes, sous le commandement, hélas ! du général d’Aurelles de Paladine, ex-sénateur et bigot, qui passait pour un capitaine.

À la fin d’octobre, si rien n’était perdu à Paris, la victoire s’offrait en province. Pour effectuer le blocus de Paris, les Allemands avaient employé toutes leurs troupes, sauf trois divisions, trente mille hommes d’infanterie et la plupart de leur cavalerie. Il ne leur restait aucune réserve. Ces trois divisions à Orléans et Châteaudun étaient immobilisées par nos forces de la Loire. À l’ouest, au nord, à l’est, la cavalerie, — 1re  et 2me  bavaroise, 22e prussienne — tout en parcourant et observant une grande étendue de terrain était incapable de le tenir contre de l’infanterie. À la fin d’octobre, la ligne allemande qui cernait Paris, très bien fortifiée du côté de la ville, était découverte du côté de la province. L’apparition de cinquante mille hommes, même de jeunes troupes comme celles dont disposait d’Au-