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spéciales des mandataires chargés de capituler. Telle fut leur veillée des armes[1].

Le 18, ils mettent Paris sur pied et les Prussiens sur le qui vive, à grand renfort de trompettes et de tambours. Pour cet effort suprême, Trochu n’a su réunir que 84 000 hommes, dont 19 régiments de garde nationale et il leur fait passer la nuit qui est pluvieuse et froide, dans la boue des champs du mont Valérien.

On s’attaquait aux défenses qui couvraient Versailles du côté de la Bergerie. Le 19, à dix heures du matin, d’un élan de vieilles troupes, — Trochu l’avoua à la tribune versaillaise — les gardes nationaux et les mobiles qui formaient la majorité de l’aile gauche et du centre avaient emporté la redoute de Montretout, le parc de Buzenval, une partie de Saint-Cloud, poussé jusqu’à Garches, occupé en un mot tous les postes désignés. Le général Ducrot, commandant l’aile gauche, était arrivé en retard de deux heures et, bien que son armée fût surtout de troupes de ligne, il n’avançait pas.

Nous avions conquis des hauteurs capitales. Les généraux ne les armèrent pas. Les Prussiens purent tout à leur aise balayer ces crêtes. À quatre heures, ils lancèrent des colonnes d’assaut. Les nôtres fléchirent d’abord, puis se redressèrent et arrêtèrent leur mouvement. Vers six heures le feu de l’ennemi diminua ; Trochu ordonna la retraite. Il y avait cependant intacts quarante mille hommes de réserve entre le Mont-Valérien et Buzenval. Sur cent cinquante pièces d’artillerie, trente au plus avaient parlé. Les généraux qui avaient à peine daigné communiquer avec la garde nationale, déclarèrent qu’elles ne supporteraient pas une seconde nuit et Trochu fit évacuer Montretout et toutes les positions conquises. Des bataillons en revenant criaient de rage. Tous comprirent qu’on les avait fait sortir pour les sacrifier[2].

  1. Voir les procès-verbaux de la Défense, arrangés par Me  Drèo, gendre de Garnier-Pagès.
  2. « Nous allons donc faire écrabouiller un peu la garde nationale, puisqu’elle en veut » disait un colonel d’infanterie, très ennuyé de cette affaire. — Enquête sur le 4 Septembre, colonel Chaper.