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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

publique ; un peu plus que la faible Commune avec ses trente interdictions pour rire. — L’état de siège fut maintenu à Paris, Versailles, Lyon, Marseille et dans tout leur département ; les conseils de guerre continuèrent leur mitraille de condamnations.

Le 31 décembre 75, quand l’Assemblée de malheur se dispersa, elle avait repoussé toutes les propositions d’amnistie, transféré quelques déportés de la presqu’île Ducos à l’île des Pins, abrégé quelques termes d’emprisonnement et même accordé six cents remises de peines les plus légères ; le réservoir Calédonien restait intact[1].

Mais, aux élections générales, le peuple n’oublia pas ses défenseurs. Dans les centres importants, l’amnistie figura sur les programmes démocratiques, les réunions publiques l’imposèrent aux candidats. Les radicaux s’engagèrent à demander une amnistie complète ; les libéraux promirent « d’effacer les traces de nos discordes civiles », comme dit la haute bourgeoisie quand elle veut bien laver les pavés qu’elle a rougis.

Les élections de février 75 furent en grande majorité républicaines. Malgré l’appel désespéré de Mac-Mahon aux réactionnaires, il y eut 350 républicains sur 530 élus. Les fameuses couches nouvelles annoncées par Gambetta dans ses campagnes infatigables montaient à la surface et allaient faire reverdir la France. Une nuée d’avocats, de médecins, de commerçants, de propriétaires libéraux avaient enlevé la province aux mots de libertés, réformes, apaisement. Buffet était battu dans les coins les plus ruraux. Les feuilles radicales s’accordèrent à déclarer la République définitivement assise ; les fervents d’amnistie ne doutèrent pas que la Chambre nouvelle ne fît au peuple ce don de joyeux avènement. Est-ce que Paris n’avait pas envoyé les anciens députés démissionnaires de l’Assemblée rurale, Floquet, Lockroy, Clemenceau, bien d’autres sans compter Louis Blanc qui parlait maintenant du malentendu du 18 Mars.

  1. Rapport de la commission des grâces présenté par Martel et Voisin