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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

volontairement mêlé aux vrais combattants un élément mauvais, des repris de justice, rôdeurs de barrière qui se dénommaient eux-mêmes « la tierce ». Les communeux mirent à la raison les plus méchants et le contact d’ouvriers d’élite améliora les autres. En 74 on ne comptait, pour faits plus ou moins graves, que 13 condamnations, sur 4 000 déportés, que 83 pour indiscipline, ivresse ou tentatives d’évasion.

Tentatives presque toujours condamnées d’avance. Les combattants de Paris n’avaient pas droit au bonheur de Bazaine, que Mac-Mahon fit évader de sa villégiature. Et, comment fuir sans argent, sans relations ? On compte une quinzaine d’évasions à peine. En 75, Rastoul, membre de la Commune, et dix-neuf de ses camarades de l’île des Pins se confièrent à une barque ; la mer rendit quelques planches et garda les corps. Plus tard, de l’île Nou, Trinquet et un ami s’enfuirent sur une chaloupe à vapeur. Poursuivis et atteints, ils se jetèrent à l’eau où l’un périt ; Trinquet fut rendu à la vie et au bagne.

Il broyait toujours les communeux sans les réduire. Un seul s’y montra misérable ; Lullier : exempté de la mort et qui dénonça une tentative d’évasion. Maroteau y mourut au commencement de 75. La commission des grâces avait commué Satory en l’île Nou. À vingt-cinq ans, pour deux articles, il s’éteignait au bagne pendant que les journalistes versaillais qui avaient demandé et obtenu le carnage s’épanouissaient à Paris. « Ce n’est pas une grande affaire de mourir, dit-il aux amis qui entourèrent son agonie, mais j’eusse préféré le poteau de Satory à ce grabat infect. Mes amis, pensez à moi ; que va devenir ma mère ! » Il n’était pas de mois qui n’eût ses morts ; années sur années apportèrent les mêmes glas. En 78, Pritzbuer est remplacé par Olry point clérical, dit-on, juste, à ce qu’on assure. Les communeux du bagne reçurent toujours la bastonnade comme au temps de Pritzbuer et de La Richerie. Les déportés de la grande Terre n’eurent pas le sort meilleur. Quelques-uns graciés, mais obligés de rester en Calédonie, demandèrent au commissaire de Nouméa un travail qu’ils ne pouvaient trouver ; il leur répondit : « Volez, vous aurez du pain pour longtemps, » L’un