Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/445

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
431
HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

introuvables. L’explosion de fureur qui emporta la vie des deux généraux avait été spontanée, foudroyante. Les acteurs du drame s’appelaient la foule et avec elle, ils s’étaient évanouis. Les juges militaires ramassèrent des accusés au hasard comme leurs collègues avaient, sur les Buttes-Montmartre, fusillé les premiers venus.

« Simon Mayer, disait le rapport, essaya jusqu’au dernier moment de défendre les prisonniers, et Kazdanski lui-même, voulut s’opposer à l’exécution des menaces de mort. La foule l’injuria et lui arracha ses galons. » Herpin-Lacroix avait tenté des efforts désespérés. Lagrange, qui avait refusé de former le peloton d’exécution, se sentait si fort de son innocence qu’il était venu s’offrir aux juges. Le rapport en faisait l’accusé principal avec Simon Mayer, Herpin-Lacroix, Kazdansky et un sergent de la ligne, Verdagner qui, le 18 mars, avait levé la crosse en l’air.

L’affaire fut menée par le colonel Aubert, ricaneur, mélodramatique et dévot. Malgré ses efforts et ceux du commissaire, on ne put trouver la moindre preuve contre les accusés. Même les officiers de l’armée qui accompagnaient le général Lecomte, déposèrent en leur faveur. « Simon Mayer a fait tout son possible pour nous sauver », disait le commandant Poussargue. Cet officier avait entendu une voix crier : « Ne tuez pas même les traîtres sans jugement ! Formez une cour martiale ! » Textuellement les paroles d’Herpin-Lacroix. De tous les accusés il ne reconnaissait que Mayer. Un autre officier faisait une déposition identique. Verdagnier démontra qu’à l’heure de l’exécution il se trouvait au baraquement de Courcelles. L’accusation niait, sans produire un seul témoignage. Ribemont prouva qu’il s’était jeté à la tête des assaillants dans la chambre de la rue des Rosiers. Masselot n’avait contre lui que des témoignages de femmes ennemies prétendant qu’il s’était vanté d’avoir tiré sur les généraux. Le capitaine Beugnot, aide de camp du ministre, et présent à l’exécution, affirmait, au contraire, que les généraux avaient été entourés par les soldats ; M. de Douville-Maillefeu, que le front des pelotons était composé de neuf soldats dont il désignait les régiments.

Il n’y avait même pas de faux témoins officiels