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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

ports en blanc, non pour lui, mais pour quelques-uns de ses officiers de nationalité étrangère. Sur le refus des Versaillais, Faltot commit la faute d’adresser la même demande aux Allemands. Mac-Mahon, dans la prévision d’un siège, avait encore sollicité l’assistance du prince de Saxe, et l’Allemand veillait pour son confrère. Pendant ces pourparlers, le général Vinoy s’était ménagé des intelligences dans la place où quelques hommes tarés s’offraient à réduire les fédérés intraitables. De ces derniers était Merlet, garde général du génie et de l’artillerie, ancien sous-officier, bien résolu à faire sauter la place plutôt que de la rendre. La poudrière contenait 10 000 kilogrammes de poudre et 400 000 cartouches.

Le dimanche, à huit heures du matin, un coup de feu retentit dans la chambre de Merlet. On accourut ; il gisait à terre, la tête traversée par une balle de revolver. Le désordre de la chambre, la direction de la balle attestaient une lutte. Un capitaine adjudant-major du 99e, Bayard, très exalté pendant la Commune et que les Versaillais mirent en liberté, avoua seulement qu’il avait dispersé les éléments de la pile préparée par Merlet pour faire sauter le fort.

Le lundi, le colonel versaillais renouvela sa proposition. La lutte était terminée dans Paris. Les officiers délibérèrent et il fut convenu qu’on ouvrirait les portes. À trois heures, les Versaillais entrèrent. La garnison, sans armes, était massée au fond de la cour. Neuf officiers furent enfermés à part.

La nuit, dans les fossés, à cent mètres de l’endroit où tomba le duc d’Enghien, ces neuf officiers s’alignèrent devant le peloton d’exécution. L’un d’eux, le colonel Delorme, se tourna vers le Versaillais qui commandait et lui dit : « Tâtez mon pouls, voyez si j’ai peur. »