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Bancel, drapé dans la phraséologie de 48, et Jules Simon, très de sang-froid. Il excuse l’absence de Gambetta, « cette réserve de l’avenir », expose les raisons stratégiques qui font de la place de la Concorde un rendez-vous meurtrier, flagelle l’Empire, feignant d’ignorer qu’on est là pour leur procès. On les interrompt, on leur rappelle Juin. Les députés sortirent pleins d’un ressentiment qu’ils devaient trop assouvir. On ne parla plus du 26 octobre ; mais le Gouvernement fit des préparatifs formidables dont Paris se moqua comme l’année précédente.

Il y a désormais deux oppositions : celle des parlementaires de Gauche, celle des socialistes avec un grand nombre d’ouvriers, d’employés, de la petite bourgeoisie. Ceux-ci disent : « Les plus beaux discours n’ont rien empêché, rien donné ; il faut agir, secouer l’Empire jusqu’à l’évulsion. » L’occasion s’offre. Le 21 novembre, Paris doit remplacer quatre députés, Gambetta, Jules Favre, Picard, Bancel qui ont opté pour la province. Belleville va de Gambetta à Rochefort. L’auteur de la Lanterne accepte les cahiers de Gambetta, arrive de Belgique, soulève dans les réunions l’enthousiasme insensé. Ses compétiteurs, sauf Carnot, s’effacent. Pour souffleter l’Empereur, on admet que Rochefort prête le serment obligatoire ; partout ailleurs, le parti d’action exige des insermentés, désigne Ledru-Rollin, Barbès, Félix Pyat. Le vieux tribun refuse de venir, le second se meurt à La Haye, Félix Pyat n’a aucun goût pour les casse-têtes. Rochefort seul est élu : dans les trois autres circonscriptions, les hommes du passé l’emportent, deux de 48, Emmanuel Arago, Crémieux très déjeté, plus un vieux républicain à calembredaines, Glais-Bizoin.

Ces trois, joignirent la Gauche qui venait, dans un manifeste, de flétrir le mandat impératif. « La liberté de discussion, disaient ces messieurs, la puissance de la vérité, c’est à ces armes que les soussignés entendent recourir ; ils n’en saisiraient d’autres que si la force essayait d’étouffer leurs voix. » On leur riva le clou. « La Gauche n’a pas été formée pour revendiquer les libertés que le tiers-parti obtiendra plus aisément. En s’isolant du peuple on se rend d’avance incapable de