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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

où la résistance est merveilleuse, retardera pendant deux journées l’invasion du Luxembourg.

Nous sommes moins sûrs à l’extrême gauche. Les Versaillais ont cerné de bonne heure le cimetière Montparnasse tenu par une poignée d’hommes. Près du restaurant Richefeu, les fédérés ont laissé approcher l’ennemi et démasqué à bout portant des mitrailleuses. Inutilement. Les Versaillais, très nombreux enlèvent les fédérés. De là, rasant les remparts du XIVe, ils atteignent la place Saint-Pierre. Les fortifications de l’avenue d’Italie et de la route de Châtillon préparées de longue main — toujours contre les remparts — sont prises à revers par la chaussée du Maine ; la défense du carrefour des Quatre-Chemins se concentre autour de l’église. Du haut du clocher, une dizaine de fédérés de Montrouge appuient la barricade qui ferme aux deux tiers la chaussée du Maine. Trente hommes la tiennent plusieurs heures. Leurs cartouches s’épuisent et le drapeau tricolore monte sur la mairie à l’heure même où il domine les buttes Montmartre. La voie est dès lors ouverte jusqu’à la place d’Enfer. Les Versaillais y arrivent après avoir essuyé le feu de l’Observatoire où quelques fédérés se sont ralliés.

Derrière ces lignes forcées, d’autres défenses s’élèvent par les soins de Wroblewski. La veille, à l’ordre d’évacuer les forts, il avait répondu : « Est-ce trahison ou malentendu ? Jamais je n’évacuerai. » Montmartre pris, le général était venu presser Delescluze de transporter la lutte sur la rive gauche. La Seine, les forts, le Panthéon, la Bièvre, formaient à son avis un réduit assuré et l’on avait pour retraite les campagnes libres ; conception juste avec des troupes régulières ; mais on ne déplace pas militairement le cœur d’une insurrection et les fédérés s’obstinent de plus en plus à garder leurs quartiers.

Wroblewski rentra à son quartier général, réunit les commandants des forts, prescrivit des dispositions pour la défense et revint prendre le commandement de la rive gauche que lui donnaient les décrets antérieurs. Quand il envoya des ordres au Panthéon, on lui répondit que Lisbonne y commandait. Wroblewski, sans se décourager, mit en état de défense le