Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/238

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sa sévérité. Longuet dit qu’il n’avait pas « d’esprit politique ». La Commune cassa ses arrêts, commua en trois mois d’emprisonnement une condamnation à mort. Rossel se retira et fut remplacé par Gois.

Puisqu’on reculait devant la discipline de la guerre, il fallait changer de tactique. On ne fit qu’incriminer Cluseret. À la séance du 23, Avrial le met sur la sellette, le presse de questions sur le nombre d’hommes, de canons dont dispose la Commune. Cluseret prend des attitudes. « Les airs de dictateur ne nous vont pas », lui dit brutalement Delescluze qui reproche à Cluseret de laisser Dombrowski à Asnières avec 1 200 hommes et lâche le mot trahison. « Je suis un homme déshonoré ! » s’écrie Cluseret et il veut quitter la salle. On s’y oppose. Longuement il se disculpe sans convaincre, car le surlendemain un membre de la Commune demande qu’il soit arrêté pour avoir favorisé les sous-comités.

Ces sous-comités sont des boutures du Comité Central qui ont pris un peu partout. Le 1er  avril, la Commune demande ce que signifie ce comité de la rue d’Aligre qui donne des ordres ; le 6, elle décide que ces sous-comités seront dissous ; le 9, Theisz annonce qu’ils persistent, que celui du xviiie vient d’être installé par le Comité Central. Le 26, les sous-comités sont toujours si envahissants que la Commune vote encore leur dissolution, et Vermorel : « Il faut savoir qui a le pouvoir, de la Commune ou du Comité Central » ; il veut qu’on en finisse. Mais on n’en finit pas. Le 26, la commission militaire, reconnaissant que décrets et ordres restent lettre morte, charge les municipalités, le Comité Central, les chefs de légion de réorganiser la garde nationale ; aucun de ces mécanismes ne fonctionne sérieusement, ce qui fait que des membres de la Commune et des officiers généraux se mettent à rêver d’une dictature militaire.

Avant la fin d’avril, pour tout œil exercé, l’offensive promise par Cluseret est impossible. Au dedans, des hommes actifs, dévoués, s’épuisent en luttes énervantes contre les bureaux, les comités, les sous-comités, les mille rouages prétentieux d’administrations rivales et perdent une journée à se faire délivrer un canon. Aux