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niser la garde nationale, de nommer le chef d’état-major, un traitement personnel. La Commune les renvoie aux commissions exécutive et militaire et ne résout rien encore. Ce jour, enfin, on pense à la province où l’on enverra des délégués.

Les décrets, les usurpations de pouvoir, le décousu des délibérations servirent de prétexte à la fraction radico-libérale de l’assemblée. Il n’était pas de séance qui n’eût enregistré trois ou quatre démissions. Si leur convention du 25 avait été sincère, s’ils avaient eu souci des destinées de Paris, les maires et adjoints élus auraient embrassé courageusement leur mandat et peut-être déplacé des majorités. Comme ceux de province, ils désertèrent, bien qu’ils eussent accepté les candidatures. Beaucoup n’étaient jamais venus à l’Hôtel-de-Ville. D’autres levaient les bras, s’écriaient, lamentables : « Où allons-nous ! » Celui-ci était moribond : « Vous le voyez, je n’ai qu’un souffle. » Les plus injurieux depuis cherchaient d’humbles défaites avec force « vœux bien sincères », comme M. Méline [1]. Leurs démissions, les élections doubles laissaient ving-deux sièges vacants quand la Commune valida les pouvoirs. Fidèle aux meilleures traditions de la République française, elle admit le Hongrois Léo Frankel, un des plus intelligents de l’Internationale, que le XIIIe avait nommé. Six candidats ne réunissaient pas le huitième des suffrages exigés par la loi de 49 ; on passa outre, leurs arrondissements, composés de quartiers réactionnaires, se dégarnissant tous les jours.

Les riches, les hommes d’ordre, deux fois étrillés, place Vendôme et au scrutin, continuaient de s’enfuir à Versailles qu’ils alimentaient de colères nouvelles. La ville réactionnaire avait pris une physionomie de bataille. Tout annonçait la lutte prochaine. Déjà, M. Thiers avait coupé Paris de la France. La veille des échéances d’avril, le 31 mars, le directeur des postes Rampont, faussant la parole donnée au délégué de la Commune, Theisz, s’enfuyait après avoir désor-

  1. Appendice III.